Sur son tout nouveau blog Gotch.info, Gotch se livre à l'exercice d'écrire et d'expliquer à ceux qui le suivent, ses journées d'enregistrements, avec le groupe The Good New Times. Voici la première partie s'étalant sur les 4 premiers jours.
Journal d’enregistrement - Jour 1
Le 10 février
L’enregistrement a commencé. Pour le premier album “Can’t Be Forever Young”, j’ai joué la plupart des instruments et j’ai demandé à John McEntire résidant à Chicago de s’occuper du mixage ; c’est donc une œuvre « partiellement faite-maison ».
Cette fois, j’ai enregistré dans un grand studio avec tous les membres du Gotch Band qui ont également participé à la tournée du premier album. Ils sont très réactifs, du coup c’est amusant de travailler avec eux. Lorsque j’émets une idée, ils me font une dizaine de contre-propositions et nous ne nous retrouvons ainsi jamais dans l’impasse pour les chansons. Ils donnent de nouvelles couleurs à mes idées.
En plus, ils portent un intérêt maniaque pour les pédales d’effets, le synthétiseur et les autres équipements et je suis très content que plusieurs instruments puissent apparaître [ndt : dans les chansons]. Chacun de nous affectionne différentes sortes d’instruments et lorsque je pars acheter toutes sortes de pédales étranges, ils s’y opposent. C’est encore plus amusant.
Comme une sorte de fierté amusante. Mais en réalité je pense que cet amusement fait partie du package de l’œuvre. Je ne suis pas spécialement amusé lorsqu’on me dit de manière directe que « les chansons sont inhabituellement joyeuses » par exemple, mais je suis convaincu que cela peut être dit par des gens qui oeuvrent pour la vivacité de l’interprétation d’un morceau. Je pense que cela s’apparente au genre de joie que l’on ressent quand on trouve un trésor au fond d’un tiroir.
Cette fois, j’ai demandé l’aide du producteur Chris Walla, qui a travaillé pendant de longues années avec Death Cab For Cutie. Lui et son assistant ingénieur sont très stimulants. Ils font de nombreux tests au micro en changeant à chaque fois quelques sonorités. Les enregistrements effectués via un magnétophone datent et j’ai été ému par la chaleur du son qui s’en dégage. Je suis persuadé que côtoyer le travail de production de personnes que j’admire depuis toujours sera un plus dans ma carrière.
Journal d’enregistrement - Jour 2
C’est un environnement de travail très stimulant. Le travail de production de Chris est lumineux et il me guide clairement de sorte que je me donne toujours à fond. Dans le cas de mes compatriotes nippons, ils arrivent souvent que 80 % des avis soient donnés et que tous ensemble nous atteignons les 100%. Mais quand je travaille avec des ingénieurs et producteurs occidentaux, ils exposent d’abord clairement les idées et avis qu’ils estiment être les meilleurs selon eux. Je sens qu’on doit suivre ce genre d’exemple.
Ensuite, durant l’enregistrement qui suivit, ils ont fait des remarques positives comme « Cool », « Super ». Ils n’ont que très rarement employé des mots négatifs ou paradoxaux comme « mais ». Les personnes qui utilisent des mots positifs éclaircissent aussi la pièce. Au Japon on parle de « kotodama » [ndt. « l’âme du langage »] mais lorsqu’on ressent cette âme chez des interlocuteurs anglophones, c’est très intéressant. C’est également en ce sens que je souhaite suivre leur exemple.
A part ça, j’apprends aussi beaucoup concernant le micro. C’est une très bonne expérience. Plus que tout, Chris est ravi de chaque opération et j’en suis également heureux.
Journal d’enregistrement - Jour 3
L’enregistrement d’une seule traite via le magnétophone se poursuit. Pour cette session, je ne joue pas de la guitare électrique ; je me charge juste de la guitare acoustique et des bruitages. Du coup je serai plutôt libre durant les sessions de cette semaine. Je vais juste me battre contre la toux et accompagner les voix du guide. J’étais le plus fatigué de tous donc c’était embêtant.
L’enregistrement s’est bien passé. Chris s’occupe du "sound making" et accorde beaucoup d’importance aux moindres détails, que ce soit l’utilisation et la position du micro, le ton ou encore la puissance du son. C’est très stimulant. Des oppositions chimiques et magiques apparaissent dans les morceaux, de nouveaux points de vue émergent sous divers angles.
Journal d’enregistrement - Jour 4
Le travail se passe bien. Nous avons fini d’enregistrer les basics pour toutes les chansons. Ensuite, nous les écoutons à nouveau toutes l’une après l’autre depuis le début et on choisit celles à refaire. En général dans un studio lambda, on finit chaque chanson l’une après l’autre mais dans ce studio, on revient sur les chansons dont l’enregistrement est déjà fini et on réajuste leur feeling et leur groove. C’est une façon de faire très originale. Je ne peux pas faire abstraction des détails mais je cherche avant tout à ce que ce soit très fluide. Et puis c’est un travail qui nécessite l’aide d’un large réseau qui se doit d’être minutieux, en soignant les fluctuations et l’intensité du son.
Comme j’écris un peu tout le temps la même chose dans le journal d’enregistrement, je compte vous présenter à partir de maintenant les membres du Gotch Band. Ils ont tous un charme particulier et leur originalité. Chacun d’eux produit une musique splendide que je souhaite aussi vous transmettre.
? Batterie : mabanua ?
J’ai rencontré le batteur mabanua lors d’un live accompagné de chant à la préfecture de Gunma. Il avait déjà attiré mon attention auparavant avec ses productions, mais on s’est recroisés par hasard ; je me suis souvenu de lui et là je lui ai dit « j’aimerais que tu joues de la batterie ». La deuxième fois, il a accepté. J’étais très heureux.
Son charme est qu’il apporte avec lui ses 16 temps et l’essence du swing dans un studio rock qui persiste avec des 8 temps qui ne font que monter et descendre. Il montre dans ses performances une chose évidente : l’intensité dans la musique qui n’est pas exprimée dans MIDI ou Zerosamu. De plus, il m’a été d’une grande aide car il chante également.
Récemment il est devenu populaire dans beaucoup d’endroits, du coup il est très occupé et il se peut qu’il ne soit plus sollicité par le groupe. Mais pour l’instant nous en profitons et nous créons des morceaux avec ce génie plébiscité par beaucoup de monde, sans penser à ce qui pourrait se passer.
Il est adorable et charmant mais j’ai l’impression qu’il a aussi un peu un côté “toxique” ; je pense que c’est une personne très intéressante.